L’association People and the Sea, installée aux Philippines sur l’île de Malapascua, a publié une analyse de la biodiversité marine et des récifs coralliens. Un travail qui doit beaucoup à l‘engagement des écovolontaires et qui légitime l’action de l’association auprès des autorités locales.
Tout écovolontaire est en droit de se poser la question suivante : « Le travail fourni pour l’association auprès de laquelle je m’engage sert-il à quelque-chose ? » Cette interrogation est plus que légitime et fait partie des critères développés dans la charte de l’écovolontariat afin de mieux appréhender le bien fondée d’une mission.
En effet, cette charte éthique, élaborée à la suite d’une consultation participative en 2014, fait état de huit engagements dont un concernant la communication sur les missions en matière de résultats scientifiques ; à savoir la transparence sur le programme de recherche ou de conservation, notamment les objectifs, la méthodologie, et si possible les résultats et publications.
Des écovolontaires formés aux méthodes de relevés scientifiques
Les résultats scientifiques ainsi que leurs impacts sur la gestion des territoires en matière écologique constituent l’essence des missions d’écovolontariat. Pour mieux illustrer ces propos, je vous emmène aux Philippines auprès de l’association People and the Sea qui publie un rapport scientifique démontrant l’évolution des récifs autour de Malapascua de 2016 à 2018.
L’ONG People and the Sea a été créée par Axelle Jorcin et Ian Mills sur l’île de Malapascua au cœur de l’archipel des Philippines. Elle se consacre à la protection de la biodiversité marine, au soutient de la population locale afin d’accroitre son potentiel de résilience tout en travaillant sur la gestion durable des ressources. Tous les mois, elle organise des missions d’étude des fonds marins, en formant des écovolontaires à la plongée et aux méthodes de relevés scientifiques.
1,8 million de pêcheurs philippins dépendent des ressources marines pour assurer leur subsistance
Aujourd’hui, les récifs coralliens apparaissent comme un enjeu dans la bataille contre le réchauffement climatique. Fragilisés quand ils n’ont pas commencé à disparaître des eaux chaudes de certaines parties de la planète, leur écosystème fait pourtant vivre encore 370 millions de personnes. Appelés forêts sous-marines eu égard à leur importante biodiversité, leur rôle économique et écologique sont cruciaux. Garde mangé pour les pêcheurs, barrière naturelle contre les vagues de submersion, puit de capture du carbone, potentiel de développement économique grâce au tourisme, le corail forme un écosystème qui apporte des services immenses aux populations. Aux Philippines, 1,8 million de pêcheurs vivent des récifs coralliens. Or, le corail des Philippines, au même titre que l’ensemble des récifs dans le monde, n’est pas en bon état, et le récif qui de l’île de Malapascua où est située People and the Sea, ne fait pas exception. Les récifs de Malapascua subissent des détériorations en raison de phénomènes naturels comme les typhons et certains prédateurs, mais également à cause d’événements anthropiques à l’instar de pratiques de pêche destructrices, de la pollution des eaux, des ancres des bateaux, de comportement touristique non adapté et de la présence de déchets. A cela, il faut ajouter des phénomènes systémiques comme le réchauffement et l’acidification des océans.
18 sites surveillés par les volontaires
People and the Sea assure la surveillance de 18 sites : 10 autour de Malapascua, 6 situés au nord-est de Daanbantayan mainland et 2 autour de l’île de Carnaza. Pour l’étude de ces récifs coralliens, la méthode employée est tirée d’associations spécialisées dans les sciences participatives comme ReefCheck. Quatre composantes sont étudiés sur les sites dont les benthiques (organisme vivant attachés au substrat), les invertébrés, les poissons et le recrutement de coraux (le recrutement de coraux donne une idée de la capacité qu’a un récif à se reconstruire).
« Les 207 écovolontaires qui se sont engagés depuis 2015 ont mené un véritable travail de fourmi d’observation et de classement », souligne Axelle. Leur donner la possibilité de lire les premiers résultats (consultable en ligne sur le site de l’association) représente une vraie avancée, même si comme le rappelle Axelle « la recherche n’est pas terminée ».
Avec People and the Sea, les volontaires sont formés sur place et restent au minium quatre semaines. Si le volontaire n’est pas certifié plongée, il peut passer ses deux premiers niveaux plongée en début de mission. Tous reçoivent une formation avancée en méthodes de plongée scientifique pour pouvoir évoluer dans les différents milieux marins en toute sécurité et sans risque d’abimer les fonds marins. Un enseignement est également donné par une équipe de biologistes marins de façon à effectuer le travail de collecte de données dans les règles dictées par les chercheurs en sciences.
Des résultats concrets
Les sites surveillés par l’équipe de People and the Sea montrent un niveau de “corail dur” plus élevé que la moyenne des Philippines, et en progression de 6 % entre 2016 et 2018, un signe optimiste après les événements destructeurs comme les typhons Yolanda et Ruby.
Le rapport montre également que le nord de Malapascua est en majorité couvert par du corail mou qui, contrairement au corail dur, est considéré comme un signe de récifs dégradés.
Le développement des activités touristiques sur l’île semble avoir une double conséquence. D’une part, il a permis de diminuer la pression liée à la sur-pêche car il a apporté de nouveaux moyens de subsistance. D’autre part, le développement touristique, mal contrôlé entraîne une sur consommation des ressources naturelles, une pollution des eaux (pollution et déchets solides), ainsi qu’un tourisme parfois destructeur de
l’environnement (ancres de bateaux, sites de plongée en sur-capacité, etc.).
Pour bien étudier quel est l’impact réel, direct ou indirect du tourisme sur la santé des récifs, People and the Sea met en avant la nécessité de continuer la recherche sur le long terme.
« Apporter des données objectives et documentées selon un protocole scientifique précis, nous donne une légitimité auprès des autorités locales qui commencent à faire appel à nous pour porter un projet ou demander un avis », explique Axelle tout en insistant sur le rôle fondamental des écovolontaires. « Sans le travail et l’énergie fournis par les écovolontaires, il n’aurait pas été possible de collecter les données nécessaires à ce rapport, seul état des lieux des habitats marins de la région. Et en terme d’actions concrète ce suivi nous a permis de détecter une surpopulation soudaine d’Acanthaster planci (étoiles de mer prédatrices des coraux).» Et de continuer : « Nous analysons les données récoltées et travaillons avec la population des pêcheurs pour cartographier les différentes zones en matière de biodiversité. Aujourd’hui, nous sommes capables de travailler sur la durée et d’apporter un conseil auprès des organismes gouvernementaux et autres ONG sur les différentes problématiques environnementales de l’île. »
Si vous souhaitez partir en mission d’écovolontariat avec People and the Sea c’est ici !