Nathalie Jouat (26 ans) et Nicolas Bonniot (28 ans) parcourent le monde depuis plus d’un an. Leur voyage s’organise autour d’un projet professionnel appelé “Nature en construction”. Ils ont choisi le Wwoof comme fil rouge de leurs aventures : la maison écologique, les énergies renouvelables et la permaculture.
> Eco-volontaire.com : Globe-trotters, votre voyage autour du monde prend la forme d’un engagement pour l’environnement. Comment ce projet s’est-il concrétisé ?
Nathalie et Nicolas :Avant cette grande aventure, nous étions tous les deux employés dans de grandes entreprises d’info-com à Paris. Nous n’étions pas heureux dans nos costumes de “cadres dynamiques urbains”. Cette vie était trop stressante et nous aspirions à des choses moins futiles dans nos emplois respectifs. Dans un premier temps, nous avions décidé de déménager en campagne, puis nous nous sommes aperçus que nous ne savions pas vraiment quoi faire là-bas ! Nous avions également envie de voyager, avant de nous poser définitivement quelque part. Alors nous avons cherché un moyen de concilier nos envies et nos projets professionnels. C’est ainsi que l’idée de Nature en construction est née. Le fil rouge du voyage a été défini en fonction de nos projets :
– la maison écologique, puisque nous souhaiterions en construire une nous-même à notre retour,
– les énergies renouvelables, qui vont nous permettre d’accéder à l’autonomie énergétique dans notre maison et notre vie de tous les jours,
la permaculture, qui nous permettra d’engager une relative autonomie alimentaire grâce aux fruits de notre travail au potager.
> Quel est votre itinéraire ?
Nous avons traversé le Canada, qui est plus ou moins sur le chemin ! Nous sommes ensuite allés en Nouvelle-Zélande car c’est une destination qui nous attirait fortement. Puis nous avons mis le cap vers le Japon et l’Asie du Sud-est. Le programme initial était différent, mais au cour du voyage nous nous sommes adaptés à nos contraintes budgétaires et aussi morales, car un an et demi de vadrouille a changé beaucoup de choses dans nos esprits.
> Vous avez choisi, grâce au Wwoofing, de partager la vie des fermiers spécialisés en agriculture biologique. Pouvez-vous nous en dire plus sur le wwoof et les wwoofer ?
Nous avons wwoofé en France, pendant 3 mois dans 3 familles différentes. Au Canada pendant 3 mois dans 6 familles, En Nouvelle-Zélande, pendant 6 mois auprès de 10 familles, puis au Japon, 2 mois et dans 2 familles. Nous avons eu l’opportunité de partager énormément de choses avec nos hôtes. Toutes ces expériences se sont révélées différentes et enrichissantes.
Le wwoof, c’est l’acronyme de : willing worker on organic farm. C’est un concept né en Australie qui s’est progressivement développé dans le monde entier. Le principe est le suivant : on travaille entre 3 et 8 heures par jour, en échange du gîte et du couvert. Contrairement à ce que le nom et l’idée laisse supposer, le travail n’est pas toujours lié à la ferme et encore moins l’agriculture biologique ! Nous avons finalement passé très peu de temps dans des fermes bios. Que ce soit en France ou ailleurs, le wwoofing, c’est plus une opportunité de passer du temps dans une famille, avec des gens qui vous ouvrent leur maison et parfois leur cœur. En France, nous avons travaillé en moyenne 5 heures par jour, de même au Canada. En Nouvelle-Zélande c’était plutôt 3 ou 4 heures et au Japon, plutôt 6 ou 8 heures ! Chaque famille, chaque pays est particulier et c’est cela qui fait tout l’intérêt du wwoofing, la diversité ! De ce que notre expérience nous a laissé voir, les wwoofers sont là pour des raisons toutes aussi différentes que les hôtes ont des wwoofers : certaines personnes cherchent simplement un moyen économique de voyager et ne s’intéressent pas vraiment au travail, ni aux gens. D’autres sont là pour découvrir la vie de manière écologique et le travail avec les animaux fermiers, d’autres encore comme nous, sont là pour apprendre des choses bien précises et échanger avec les personnes qui nous accueillent.
> Qui, selon vous, peut être wwoofer ? La travail est-il physique ?
Absolument tout le monde peut être wwoofer ! Nous étions tous les deux en très piètre condition physique quand nous avons commencé il y a un an 🙂 Nous avons croisé des personnes de tous les âges, de toutes les corpulences, de toutes compétences. Le travail est parfois physique, il nous est arrivé de travailler sur des terrains escarpés et pentus, de soulever de lourdes charges, de travailler longtemps et de manière intense. Mais parfois, nous avons aussi tenu des marchés, emballés des petits gâteaux, nettoyé, cuisiné, gardé des enfants … Il suffit de cibler l’hôte qui propose un travail qui vous intéresse ou vous correspond. Un e-mail, un coup de fil, vous permet d’en savoir plus et d’informer les gens de ce que vous pouvez ou ne pouvez pas faire.
> Ces missions vous ont-elles apporté des connaissances en agriculture biologique, des réponses sur une façon de vivre plus en harmonie avec la nature ?
Oui, tout à fait et c’est cela que nous étions venus chercher. Nous étions sensibilisés à l’écologie et à une manière de vivre “naturel” avant de partir. Mais à part les petits gestes de la vie de tous les jours et les efforts pour prendre les transports en commun, c’est difficile d’être “écolo” à Paris. Nous souhaitions rencontrer des gens qui vivent en autonomie à la campagne. Nous n’avons pas été déçus ! Nous avons passé du temps chez plusieurs personnes autonomes d’un point de vue énergétique et alimentaire. Nous avons appris des choses sur la permaculture et la tenue d’un jardin bio, d’autres choses sur différentes techniques de construction d’une maison écologique… Nous avons partagé toutes ces choses avec les lecteurs de notre site internet, par le biais de fiches de savoir, de photos, de résumé .
En revanche, il n’a pas toujours été facile d’accéder à ces connaissances, nous avons fait un très gros et long travail de recherche en amont pour trouver des hôtes de wwoofing intéressants pour notre projet et nous avons parfois était très déçus. Avec l’essor du wwoofing, il y a beaucoup d’hôtes qui pensent à la main d’œuvre gratuite plus qu’au partage des connaissances ou d’un mode de vie. C’est triste, mais c’est la réalité. Il nous est arrivé de ramasser des branches pendant une semaine, ou de ne faire rien d’autre que du désherbage à la main, ou encore de passer 3 semaines à faire la cuisine pour tout le monde !
> Avez-vous des anecdotes particulières lors de vos séjours chez des hôtes de wwoofing ? Quelles sont les particularités du Wwoof selon les pays ?
Nous avons vécu des choses parfois irréelles, dans le bon comme dans le mauvais sens du terme.
En France, une personne nous a demandé pendant 2 jours de retirer, à la main, des cailloux d’une tranchée et de les classer par taille pour une éventuelle réutilisation. Certaines personnes sont vraiment mal organisées et vous demandent de faire des choses qui n’ont pas de sens. Nous essayons parfois de discuter, mais il arrive que ce soit trop difficile. Au Canada, il m’est arrivé de me transformer 3 semaines en chef et de faire la cuisine pour 10 personnes tous les jours. Au Canada toujours, nous avons passé 2 semaines chez une ancienne joueuse professionnelle de football, elle était très athlétique et donnait aux wwoofeuses des travaux beaucoup trop difficiles, attendant de nous la même condition physique que la sienne. Nous avons creusé des tranchées à la pelle sous la pluie et installé un faux plafond avec simplement des clous et un marteau. Cette même personne n’avait pas de logement pour les wwoofers et nous laissait dormir sous une tente dehors alors qu’elle rentrait ses chiens la nuit de peur qu’ils se fassent attaquer par les loups ! En Nouvelle-Zélande, nous avons passé une journée avant de nous en aller en courant de chez une dame qui nous interdisait de prendre des douches et de laver notre linge (même à la main), elle était seule de puis longtemps et un peu folle. Nous avons eu également de bonnes surprises, notamment 3 semaines dans une famille fantastique, dans une grande maison avec piscine et jacuzzi, un grand lit king size, à manger des gâteaux et de la nourriture digne des plus grands restaurants contre 3 petites heures de travail par jours… C’est très diversifié le wwoofing et souvent c’est la roulette russe !
> Les expériences que vous vivez, les rencontres confirment-elles votre engagement pour l’environnement ?
Oui et non 🙂 Avant de partir, nous avions des convictions, parfois extrémistes sur certaines choses, car nous n’avions pas l’expérience d’une vie différente de celle que nous avions. Ce voyage nous a permis de donner un cadre au style de vie auquel nous aspirons. Par exemple, en Nouvelle-Zélande nous avons vécu 2 semaines avec un jeune couple végétalien qui construisait leur petit paradis et leur maison en terre, sur un bout de forêt vierge. Ils vivaient de manière extrêmement écologique et étaient consciencieux de tout. D’un autre côté, nous avons vécu dans un palace (le fameux piscine, jacuzzi), à manger plein de délicieuse nourriture grasse et sucrée, à travaillé peu et gâcher beaucoup. Ces deux expériences nous ont montré où notre “foi”, car on peu dire que l’écologie est un peu notre religion, se place. C’est entre les deux ! Après avoir testé plusieurs styles de vie, nous savons ce que nous voulons, les concessions que nous sommes prêts à faire pour avoir une vie saine et respectueuse de l’environnement. Mais nous savons aussi ce que nous ne sommes pas prêts à sacrifier, ce qui est important pour nous. C’est un chemin que chacun devrait chercher et cette remise en cause nous a fait beaucoup de bien !
> Où êtes-vous en ce moment ? Quand le retour en France est-il prévu ?
Nous sommes actuellement au Japon, nous venons de terminer notre dernier wwoof. Le reste du voyage se déroulera en Asie du Sud-est. Nous allons surtout visiter, faire le bilan de tout ce que nous avons appris et prendre de vraies vacances avec notre famille qui nous rejoint bientôt. Nous revenons en France fin juillet. pour nous, c’est plus un départ qu’un retour d’ailleurs, car c’est le début de la mise en pratique de toutes les choses que nous avons assimilées ! C’est le début d’une nouvelle aventure, la nôtre.
> Avez-vous de nouveaux projets ?
Pleins ! Très rapidement, nous souhaitons trouver une région en France où acheter un petit bout de terrain. Nous sommes entrain de réfléchir à la maison que nous allons y construire, probablement en bois, terre et ballots de paille. Nous sommes aussi en pleine réflexion concernant notre avenir professionnel, nous allons continuer le journalisme qui nous a faits vivre durant le voyage et sûrement nous lancer en freelance sur plusieurs activités. Nous souhaitons pouvoir travailler de chez nous et pourquoi pas ouvrir un B&B quand notre paradis écologique sera terminé ? Le voyage a fait bourgeonner un tas de petits projets à développer . Nos aventures seront relatées sur notre site internet !
Nathalie a écrit, depuis, le guide du wwoofing
>A lire aussi
– Les adresses Wwoof dans le monde
– Le Woofing en France