Tour du monde d’une écovolontaire : le Peace Refuge ou le rêve américain (1/4)
Je sors de l’aéroport d’Orlando. La coursive du terminal est déserte. Une caisse bien américaine aux vitres noires s’arrête à mes côtés et m’invite à monter. Le matin, j’entrouvre le store de la maison des volontaires, aperçois une végétation subtropicale avec des champs à perte de vue. Je suis à côté de Zolfo Springs, à deux heures de route du pays de Mickey et trois des Everglades. La saison des pluies bat son plein et Liza et Kurt, les propriétaires du ranch, guettent les ouragans.
Le centre est un immense parc avec de grandes cages remplies d’animaux sauvages. Léopards, ours, primates, tigres, cacatoès, chauves-souris… De voir ces belles bêtes enfermées est un peu triste de prime abord. Je trouve l’image du singe en cage bien choisie, j’ai l’impression que la plupart se débattent, ils n’ont qu’une envie, passer les bras à travers la cage pour nous attraper les cheveux dès qu’ils nous voient.
Animaux sauvages abandonnés
Il ne faut pas s’amuser ni à leur sourire ni à les regarder dans les yeux, ils croient qu’on les attaque.
D’après ce que j’ai pu comprendre, le sort de tous ces animaux sauvages s’est amélioré. Ils étaient jadis utilisés à des fins commerciales dans des zoo ou des parcs d’attractions. Certains, trop vieux pour amuser la galerie, passent ici une retraite dans la dignité, dans des enclos beaucoup plus grands que ceux qu’ils avaient connus. D’autres ont été abandonnés à la suite de fermeture de cirques ou par des particuliers qui un jour ont gardé chez eux des animaux sauvages, par simple fantaisie. Lisa et Kurt gèrent le sanctuaire. Leur maison est au milieu du parc, et est ouverte à tous les volontaires, soit une poignée de personnes. A priori, rien ne m’inspire ici. Le fond de l’air sent l’Amérique profonde. L’action menée au sanctuaire est louable certes, mais il apparaît comme un pis aller, au regard des zoo dont les Etats-Unis regorgent. Les préoccupations écologiques semblent reléguées au second plan, la clim tourne 24h/24 dans les maisons et les voitures… Quant à l’actualité du moment, elle est occupée par un ours en danger dans l’Iowa, Lisa et Kurt devraient le ramener d’ici à quinze jours.
Dans la boue…
Très vite, les conditions de travail s’avèrent difficiles. Je passe la journée les pieds dans la boue et regrette la paire supplémentaire de tennis que j’ai retirée au dernier moment de mon sac à dos. Le sol est gorgé d’eau, il n’absorbe plus les averses et dans le genre enquiquinement, outre l’humidité ambiante, j’ai déjà mis à deux reprises le pied dans un nid de fourmis rouges ! Le mieux reste à venir pour la journée de baptême, la nourriture des cochons. Nous partons avec une vieille Cheyenne (un pick up) de vingt ans au moins, à travers un chemin à peine carrossable, jonché de vieilles carcasses de voitures. Au parc à cochons, nous sommes accueillis par des hurlements. Les porcs se massent sur le grillage, se roulant dans une boue noirâtre. Nous montons à l’arrière du Cheyenne et jetons les restes de nourriture, qui ont macéré depuis le matin, par-dessus la barrière. L’odeur, mélangée avec celle des poubelles est à peine soutenable. Quant aux cochons, ils semblent se régaler de ce cocktail olfactif et gustatif, pataugeant de plus belle, lapant l’eau boueuse et enfournant légumes pourris et jus de poubelle.
…jusqu’aux mollets
Ce spectacle est indescriptible et pourtant, ce n’est pas la première fois que je vois manger des cochons. Mais là, on est aux États-Unis, l’immondice est démesurée. Curieusement, ce lieu m’inspire ou plutôt l’atmosphère dégagée par le contraste d’une lumière tropicale de fin de journée filtrée par les arbres avec les vieilles carcasses de voitures, du repas des cochons et de cet oiseau blanc qui vole dans le ciel. Je regrette de ne pas avoir mon appareil photo, quoique je ne sais pas comment je l’aurai protégé de la boue, nous y sommes enfoncées jusqu’à la moitié des mollets.
Suite du tour du monde d’une écovolontaire : Le Peace Refuge en Floride (2/4)